Mercredi nuit le ciel larmoyant de Luzhniki était plutôt un éclairci pour des Diables au paradis. Pour Chelsea, il était plutôt assombri et triste pour Didier Drogba qui, pour peut-être son ultime match avec les Blues, a vu rouge comme Zidane lors de la finale du mondial 2006.
Comme Zinédine Zidane, Didier Drogba est sorti par une porte pas aussi grande d’une finale à laquelle il tenait particulièrement. Sur la pelouse de Luzhniki, le héros d’une demi-finale remportée face à Liverpool est vite devenu le banni de ce qui devrait être en même temps son final et sa finale. Car depuis quelque mois et plus encore après le départ de son mentor José Mourinho de la tête de l’encadrement technique des Blues, Drogba n'a pas caché dans Francefootball son envie d'aller voir ailleurs, connaître un autre championnat, évoluer sous d'autres couleurs. Et même si, à la veille du finish de l’Uefa Ligue des Champions 2008, il tentait de brouiller les pistes en déclarant un "si je restais à chelsea?" à tous ceux qui le voyaient déjà parti de Londres, l'on savait qu'il était en contact avancé avec les dirigeants du Milan AC, le club de ses rêves d'enfant. Mais avant de partir, contrairement à la finale de la Coupe Uefa perdue sous la tunique de l'OM face à Valence, Drogba voulait plus que tout offrir quelque chose de grand, de solide, d'historique à Chelsea, à ses supporters et à son Président Abramovitch qui, en quelques années, a écrit un véritable roman pour un club anodin d’outre-manche.
Des ambitions évanouies, un rêve brisé à la 116e minute d'une rencontre qui depuis la seconde partie du jeu semblait tourner à l'avantage des copains de Frank Lampard (45e), lampe illuminante d'un Chelsea plongé dans le noir après l'ouverture du score par ce diable de Cristiano Ronaldo à la 26e minute. Tout le peuple Bleu devrait se résoudre a accepté que l'histoire était déjà écrite. Car comme pas d'habitude, Drogba d'habitude adroit ne touche que du bois sur une frappe enroulée à la 78e sur le côté gauche d'un veinard Van Der Sar. Ultime action d'éclat d'un Drogba qui paiera pour le grabuge de tout un ensemble. Ainsi en a décidé M. Michel Lubos, l'arbitre Slovaque de la finale, qui, sur un geste d’énervement de l'Ivoirien à l’encontre de Nemanja Vidic, brandit le carton rouge au numéro 11 de Chelsea. Sévère pour un joueur jusque là correct, qui avait comme Zinédine Zidane lors du mondial 2006, été agacé par les propos du défenseur croate de Manchester United. Des propos dont on ne connaît pas encore la teneur mais qui devraient être bien épicés pour avoir mis l'Eléphant hors de lui. Un incident comme celui de l'affaire Zidane-Materazzi devrait faire l'objet d'une enquête de l'Uefa pour connaître exactement les pics de Vidic à l'endroit de Drogba.
Et même si le geste de l'attaquant était condamnable, un carton jaune aurait suffi à M. Lubos pour calmer l'échauffourée. Pour un arbitre que se savait une "grande responsabilité" pour cette finale, il en avait trop pris avec une cruelle décision qui a tout changé. Car, le tir au but manqué de John Terry qui aurait du donner la victoire finale à Chelsea était celui de Drogba, à en croire les propos de Henk Ten Cate, l'entraîneur-adjoint des Blues. "John n'était pas prévu dans les cinq premiers tireurs. Mais les choses ont changé durant le match. L'exclusion de Drogba nous a forcé à changer l'ordre", a expliqué le Néerlandais. Encore Une décision arbitrale qui fait basculer toute une rencontre aux mains des Blues dans le camp des Diables tous rouges de bonheur.
Patrick GUITEY